Lorsque le formulaire de contact était encore en ligne sur le blog, vous étiez nombreux à me demander des conseils concernant les entretiens d’embauche.
Conscient qu’Internet regorge d’astuces pour réussir ses entretiens, j’ai sélectionné 5 techniques qui me semblaient être les moins abordées partout ailleurs, en rajoutant une couche de psychologie sociale.
1- L’effet Halo de Asch et la « première impression »
Asch est un pionnier de la psychologie sociale. Il a réalisé des dizaines d’expériences passionnantes dont une qu’il vous sera utile de connaître avant votre entretien : l’effet de Halo.
Si votre futur employeur juge une de vos caractéristiques positivement en premier lieu, il aura tendance à rendre plus positives vos autres caractéristiques. C’est ce qu’on appelle couramment « la première impression ». Il est donc très important de commencer votre entretien en mettant en avant une de vos nombreuses qualités.
Malheureusement, l’effet Halo fonctionne dans les deux sens. Si vous arrivez en retard, votre sens de la ponctualité sera mis à mal. Alors, ce seront toutes vos compétences qui seront jugées négativement.
2- La connivence peur-soulagement, un coup de poker !
Il n’est pas rare que certains automobilistes se garent à des endroits où le stationnement est formellement interdit. Lors d’une expérience, des chercheurs ont déposé des prospectus publicitaires sur les pares-brise de voitures mal garées. Ces prospectus ressemblaient de loin à des contraventions. A leur retour, les propriétaires des voitures avaient d’abord peur en voyant le papier ainsi posé sous l’essuie-glace. Puis, s’en suivait un soulagement énorme quand ils comprirent que ce papier n’était pas un PV.
A ce moment là, une expérimentatrice s’introduisait et abordait l’automobiliste : « Bonjour, je suis étudiante. Voudriez-vous remplir un questionnaire pour moi ? Cela ne prendra que 15 minutes. »
- Dans le cas où les chercheurs avaient déposé un prospectus sur la voiture de l’automobiliste mal garé, le taux de réponse positive était de 62% !
- Dans le cas où les chercheurs n’avaient pas déposé de prospectus et que l’expérimentatrice était simplement venue poser sa question, le taux de réponse positive a chuté à… 32% !
Cette expérience prouve que le soulagement après la peur rend les sujets bien plus dociles, sympathiques et enclin à accepter des demandes qu’ils refuseraient en temps normal.
Pourquoi ne pas profiter de cette technique pour manipuler votre employeur ? A vous de faire fonctionner votre imagination. Cette technique est un coup de poker : si vous la jouez mal, vous risquez de tout perdre.
Pour la petite histoire, lorsque j’étais étudiant en fac, j’avais du passer un entretien individuel avec un professeur. Avant que j’entre dans le centre d’examen avec lui, un passant s’est mis à crier : « Appelez les pompiers !! La voiture rouge au coin de la rue est entrain de prendre feu !! ».
Le professeur s’est mis à paniquer en pensant que c’était SA voiture qui était entrain de brûler. Sa voiture était aussi rouge et garée à proximité. Heureusement pour lui (et pour moi) ce n’était pas la sienne qui brûlait. Après ça, l’entretien s’est passé à merveille, le professeur était très détendu, très serein, très jovial. Il avait probablement été victime de la connivence peur-soulagement.
3- La psychologie de la main : être ni trop mou, ni trop violent
Un nombre invraisemblable d’études ont tenté de démontrer le rapprochement entre « testostérone », « caractère sexuel », « caractère social » et « poignée de main ». Aucune de ces études ne m’a personnellement convaincu. Elles étaient en général basées sur des échantillons ridicules (« 120 américains » par exemple).
Ce qu’il faut retenir des mains, c’est qu’elles sont la succursale de notre esprit. Tout ce que nous n’exprimons pas par la parole, nos mains s’en chargent. Lorsque vous rencontrez votre employeur, vous n’allez pas lui sauter dessus en criant « JE SUIS MOTIVÉ ET DYNAMIQUE ! », ça ferait mauvais genre pour un premier rendez-vous. Ce que vous pouvez faire, c’est transférer ces paroles dans votre poignée de main : serrez-lui la main dynamiquement. Ne lui déboitez pas l’épaule.
Chose que l’on oublie souvent : serrer la main de son employeur de la même façon à la fin de l’entretien. Keep the power.
4- Profitez du narcissisme naturel de votre employeur
Inconsciemment, on préfère discuter avec quelqu’un qui utilise des mots que l’on entend souvent ou que l’on utilise nous-même. C’est normal : qui se ressemble s’assemble.
Ce que l’Homme aime encore plus, c’est entendre son propre nom. N’hésitez pas à répéter plusieurs fois le nom de votre interlocuteur pendant votre entretien. A chaque occurrence de son patronyme, il augmentera son capital sympathie envers vous.
Et soyez malin : répondez à votre interlocuteur en réutilisant les mots de ses questions ! D’un côté vous entrez dans la bulle lexicale de votre interlocuteur, et de l’autre vous évitez le hors-sujet.
5- La soupape de sécurité : chassez moi ces micro-gestes !
Je le répète : la gestuelle est une succursale de l’esprit. Si une question vous embarrasse lors de l’entretien, vous n’allez certainement pas dire à votre bourreau : « Chiante ta question, je galère à répondre ! T’en n’as pas une autre ? », même si vous en mourrez d’envie.
Au lieu de ça, vous allez relâcher la pression en mordillant votre stylo, en vous triturant les doigts, ou en passant votre main dans vos cheveux. Pour régler le problème : respirez et prenez votre temps pour répondre. Respirez, respirez ! On oublie trop souvent de respirer et c’est seulement quand on respire un grand coup qu’on se rend compte de la force que cela nous procure, c’est surnaturel. Vous aurez l’impression que le temps s’arrête et que votre cerveau s’accélère. Alors vraiment, respirez.
6- Empathie et synchronisation avec votre interlocuteur
Vous devez absolument adapter votre comportement et votre lexique à la personne qui vous fait passer votre entretien. Dès les premières minutes, tentez de cerner cette personne. Adaptez votre langage et votre façon d’être. J’avais parlé de la synchronisation dans ce billet : 5 astuces psychologiques simples et efficaces pour vous aider à mieux draguer.
Se synchroniser avec son interlocuteur consiste simplement à mimer ses gestes, ses expressions, voire ses paroles. Attention, mimer ne veut pas dire singer ! Si vous imiter vulgairement votre employeur, vous pourrez dire adieu à votre embauche.
Vous devrez faire preuve d’empathie. Par exemple si votre interlocuteur a l’air grincheux ce jour là, vous devrez vous adapter. Je ne dis pas qu’il faut que vous tiriez la tronche aussi, mais vous devriez éviter d’affirmer votre joie devant lui.
Au contraire, si votre interlocuteur est pétillant, soyez pétillant et encore plus souriant.
Si votre interlocuteur a l’air fatigué, ne soyez pas énervant. Parlez calmement et doucement. Écoutez votre voix : si elle vous agace, elle l’agace lui aussi.
Je souhaite un bon courage à tous ceux qui ont des entretiens dans les semaines à venir. Et surtout : n’oubliez pas de sourire.
17 Commentaires
Christophe D.
23 février 2011 à 4 h 34 minMerci ! Très intéressant !
tewoz
24 février 2011 à 9 h 17 minEncore une chouette découverte ce blog!
Et article intéressant, qui me rappel beaucoup mes cours et lectures concernant la PNL, pour l’avoir testé régulièrement lors d’entretien (d’embauche essentiellement) ca marche plutôt pas mal.
Disons que ces techniques marchent lorsqu’on a réellement un levier de négociation, par exemple lors d’entretien annuel ou les dés sont généralement pipés dès le début, ces techniques sont un peu moins utile, par contre pour faire croire à un potentiel employeur qu’on est la personne qu’il faut ca marche top.
Machin
27 février 2011 à 21 h 02 minArticle très intéressant, j’ai pu expérimenter cet article avec l’article « 5 astuces psychologiques simples et efficaces pour vous aider à mieux draguer » lors d’une sortie à 7 personnes dont 5 que je n’avais jamais vu. (Un ami proche, des amis de mon ami et moi)
Ainsi après 3heures de soirée, je suis reparti avec le numéro de téléphone de la jolie fille et le facebook des autres qui m’harcelaient tous le lendemain matin pour ressortir le soir suivant.
Je croyais cette situation impossible, maintenant je vais quand même calmer le jeu car c’est un peu désagréable de se faire réveiller par SMS au milieu de la nuit.
Merci à toi !
Fajr Breeze
28 février 2011 à 17 h 50 minPour une fois, la psychologie est de notre coté 🙂 Salut
Xavier
7 avril 2011 à 14 h 36 minNan mais n’importe quoi.
« N’hésitez pas à répéter plusieurs fois le nom de votre interlocuteur pendant votre entretien »
=> Surtout pas !!
Nementon
12 mai 2011 à 23 h 34 minPour ce qui est de la synchronisation, j’ai lus dans l’encyclopédie du savoir relatif et absolue, que la population se divisait en trois groupes, ceux parlent avec pour référence le langage visuel « Tu vois », d’autres avec le langage auditif « Tu entends », et enfin ceux avec le langage corporel « Tu sens », et apparemment (pas eus le temps de bien le tester), l’appartenance à l’un de ces groupes se reconnait à la facont dont ont bouges les yeux, ainsi lors de d’une recherche de souvenir dans sa mémoire, le visuel devrait diriger son regard vers le haut, l’auditif vers le coté, et le corporel vers le bas.
Cela peut être utile pour savoir sur quels registre linguistique « surfer » pour mieux se synchroniser 😉
Felix Boussa
13 mai 2011 à 17 h 54 minHello Nementon,
Merci pour ton commentaire, je n’avais jamais entendu parler de ça. Je vais me renseigner, c’est une piste vraiment intéressante à suivre si j’en crois ce que j’ai compris.
Félix.
Kevin Imbrechts
24 septembre 2011 à 17 h 39 minSalut, en effet ça a l’air intéressant, mais j’irais pousser un peu plus loin après avoir lu le guide de détection de mensonges du décodeur du non-verbal de Romain que si l’on regarde du côté gauche c’est que l’on recherche un réel souvenir, donc on dit la vérité, mais si on regarde à droite, c’est que l’on invente un souvenir, donc on ment.
Je suppose donc que le visuel dirige son regard vers le haut, l’auditif vers la gauche, et le corporel vers le bas, et peu importe comment est l’interlocuteur, s’il ment, il regarde à droite.
Ce n’est que supposition, si ce n’est pas ça alors je suis un peu perdu.
As-tu trouver des informations, Félix?
Merci en tout cas, très bon article
Félix Boussa
25 septembre 2011 à 14 h 42 minBonjour Kevin,
Je n’approuve pas ce genre de raisonnement (le visuel, le corporel, la position des yeux en conséquence). Je trouve ça chimérique et antiscientifique. Je ne pourrai pas t’éclairer sur la question !
Quand je dis qu’il faut sourire, c’est qu’il ne faut pas « tirer la gueule ». Il faut différencier « le grand sourire de joie » et le sourire « social », celui qui te rend juste sympathique.
Même énervé, ton interlocuteur préférera te voir souriant plutôt que triste à mourir. Par contre, évite les sourires intenses et très powerful si tu sens ton interlocuteur un peu sur les nerfs.
Même si les deux parties ont lu l’article, je doute que cela pose problème. Si tu es discret et que tu gardes ton naturel, ces techniques passent incognito. Peut-être qu’un jour, ton employeur comprendra où tu veux en venir. Quoi qu’il arrive, ça sera tout à ton honneur. Les employeurs cherchent des autodidactes talentueux qui cherchent à dépasser les compétences du simple employé (cf « êtes-vous indispensable » de Seth Godin).
Enfin, pour ta question sur l’observation, je te recommande d’aller sur le forum. Je vais y publier quelques choses à ce sujet très bientôt.
Félix
Rayondargent
27 juin 2011 à 23 h 51 minBonjour Félix,
Cette fois ci, c’est la soignante qui te répond. Ce qui me stupéfie c’est que tu décris un savoir faire que j’ai développé auprès de mes patients ! Nous avons peu de temps ‘pour faire passer la pillule’ … désolée pour le raccourci, alors autant mettre toutes les chances de notre côté (heureusement avec le voeu pieu d’être utile). Je découvre ainsi que tel le ‘Bourgeois gentilhomme’ je fais de la prose sans le savoir … drôle ? Et la remarque de Nementon est également très pertinente (cf évalaution de la douleur).
~~@~~bientôt
Felix Boussa
28 juin 2011 à 11 h 44 minTu as raison, la manipulation n’est pas un mal, il faut bien l’admettre ! La manipulation est énormément (et je pèse mes mots) utilisée par les psychologues, les psychiatres et les personnes du corps médical pour faciliter le contact et la relation avec les patients. « Manipuler une relation sociale », c’est simplement connaître les rouages qui facilitent la confiance et l’échange. C’est comme huiler un mécanisme pour l’actionner plus facilement.
Félix
nabil
26 juillet 2011 à 13 h 01 minmerci de vortre aide , cé trés intéressant
Anais
3 août 2011 à 7 h 32 minExcellent article !
Tu reprends des thèmes importants pour réussir un entretien d’embauche: faire une première impression positive, utiliser le même champ lexical que le recruteur, avoir une poignée de main ferme, éviter les gestes qui trahissent la nervosité…ce sont des thèmes que j’aborde régulièrement sur http://www.Jobmachine.fr.
En ce qui concerne la connivence peur-soulagement, l’effet est très réel mais je vois difficilement comment s’en servir en entretien.
Dans ton cas, c’était quand même un sacré coup de chance cette voiture en feu…
Félix Boussa
3 août 2011 à 12 h 20 minHello Anaïs,
A moins de faire brûler toutes les voitures du quartier, il y a peu de chance que la peur-soulagement soit très utile tu as raison. En revanche, je pense qu’il est intéressant d’expliquer, malgré tout, quelques techniques qui sortent de l’ordinaire. Tu as du le lire dans mon livre, j’explique plus concrètement comment profiter de ce processus psychologique au quotidien.
Merci pour ton commentaire.
A bientôt,
Félix
Kevin Imbrechts
24 septembre 2011 à 17 h 55 minSalut Félix, j’ai 3 questions pour toi !
-Tu dis qu’il ne faut jamais oublier le sourire, ok, mais tu te contredis en disant que si l’employeur est énervé, nerveux, triste ou autre, il faut justement éviter d’être joyeux.
Je suppose que tu veux dire qu’il faut quand même sourire, mais pas trop? Quel est le juste milieux? Tu vas sûrement me dire quelque chose du genre « tout dépend de l’état de l’employeur, s’il est un peu ou beaucoup triste, énervé, nerveux… », mais n’y a-t-il pas un moyen de creuser et de trouver le juste milieux?
-Mon autre question est un peu plus générale : Que faire si l’on se retrouve dans une situation où notre interlocuteur, ici l’employeur, lit lui aussi ce blog? Ca me fait sourire cette question car je m’imagine la situation de gêne que cela pourrait provoquer. J’imagine qu’il faudrait tourner ça à la dérision ou autre chose comme sur ton article sur la répartie?
-Dernière question que je t’ai déjà posée aujourd’hui par mail je crois, mais je la mets ici pour tout le monde en fait : Comment se concentrer sur l’écoute et l’observation en même temps.
Je m’explique : Personnellement, j’ai un peu de mal à me concentrer sur l’écoute de la personne et l’observation de cette même personne et de moi-même (analyse de mes propres gestes pour mettre en confiance et éviter les postures de fermetures etc…). J’aimerais donc pouvoir faire ces 3 choses en même temps.
As-tu quelques exercices ou des conseils à donner? J’imagine qu’il faudrait un article complet pour ça.
A bientôt et merci pour ton blog très enrichissant !!
Samuel
9 avril 2012 à 9 h 28 minJ’ai un entretien mercredi, j’ai bien fait de revenir sur ton site Félix, toujours d’aussi bon conseils intemporels, merci je vais essayer de les intégrer point par point 🙂
Comment Aline (et vous aussi) allez faire une très bonne impression à votre prochain entretien d'embauche ? | Décodeur du non-verbal
8 février 2013 à 12 h 10 min[…] et son CV ont déjà fait mouche. Pour se mettre en jambe, elle a déjà lu Félix et ses 6 techniques pour manipuler son boss pendant un entretien d’embauche. Moi je voulais lui donner quelques conseils pour que son langage corporel soit un allier et […]